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Pont d’Alleyras accueille de nouveaux touristes : les Murins de Daubenton

D 12 juillet 2015     H 16:36     A mko     C 0 messages


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Ce n’est pas une famille de vacanciers issus de la noblesse parisienne qui découvre nos belles gorges sauvages de l’Allier mais une colonie d’individus, sans doute un peu SDF, qui s’installe sous le pont de pierre et de béton d’Alleyras, dans les joints de bordure.

Une équipe de passionnés de ces animaux, membres de l’association Chauve-Souris Auvergne, est venue étudier en détails cette colonie de mise-bas de chiroptères, le nom scientifique des chauves-souris, qui signifie littéralement qui vole avec ses mains. Les chauves-souris sont en effet les seuls mammifères volants au monde, et elles réalisent cet exploit grâce à une évolution de leur main qui est transformée en aile avec des doigts très allongés et de la peau tendue entre eux qui fait office de voilure.

Une des espèces présentes à Alleyras, le Murin de Daubenton, est assez commune en Auvergne, mais les habitudes précises d’une telle colonie sont méconnues. L’objectif de ce travail était d’analyser les mouvements nocturnes et diurnes de ces petits animaux, d’un poids de l’ordre de 8 grammes et d’une envergure en vol de 20-25 cm.


Image Chauve-souris Auvergne

Ainsi, une quinzaine de personnes vient de passer une semaine début juillet à compter, espionner, noter les déplacements et les habitudes de 5 individus capturés temporairement, puis relâchés après avoir été équipés d’un minuscule émetteur radio en ondes métriques. Toutes les sorties, uniquement nocturnes, des animaux ont ainsi été relevées, puis saisies sur un logiciel qui permettra une analyse plus fine, une fois l’équipe rentrée au siège de l’association, à Montaigut-le-Blanc près de Clermont-Ferrand.

Cette étude, une commande d’EDF qui est prévue pour durer 5 ans, a pour objectif d’analyser l’impact du nouvel aménagement du barrage de Poutès sur les chauves-souris.

Matthieu Bernard et Aurélia Pourriau, respectivement Président et administratrice de Chauve-Souris Auvergne, figurent parmi les personnes en charge de l’animation de cette association forte de 90 adhérents et de 3 salariés. Les objectifs de l’association sont l’étude, la conservation et la sensibilisation autour de ces petits mammifères, et elle fête cette année ses 20 ans d’existence. S’intéresser aux chauves-souris est un peu particulier et parfois la conséquence d’un parcours fait de rencontres et de découvertes, et ce fut le cas pour l’existence même de cette association dont les origines sont situées dans l’Allier, en forêt de Tronçais, suite à une rencontre avec Laurent Arthur du Muséum d’Histoire Naturelle de Bourges, le musée de référence en matière de chiroptère. Depuis, l’association a multiplié les prospections, les suivis, les animations sur l’ensemble du territoire régionale, mais l’étude mise en œuvre à Alleyras est une première à la fois dans la durée et dans la précision des informations obtenues.

Le Murin de Daubenton

Du nom scientifique Myotis daubentonii c’est un mammifère insectivore. Il dévore littéralement des kilos de moustiques et fréquente principalement la surface des plans d’eau ce qui explique sa présence à proximité de l’Allier et de Poutès. On estime ainsi qu’un seul individu consomme l’équivalent de 60 000 moustiques en trois mois d’activité environ.


Une colonie de Murins. Images Chauve-souris Auvergne

De la taille d’un pouce, le Murin de Daubenton possède un pelage marron sur le dos, et blanc pour le ventre. Son museau rose est également caractéristique. Dans le Pont d’Alleyras, il s’agit d’une colonie de femelles venant mettre bas à leur seul et unique jeune chaque année. Ce regroupement en colonie permet ainsi aux femelles d’aller chasser la nuit venue en confiant leur jeune à des nourrices qu’elles vont relayer tout au long de la nuit. Ce phénomène a été nettement mis en évidence par le suivi réalisé cette année avec des retours au gîte des individus équipés en générale vers 2-3 heures du matin.

Mais le pont d’Alleyras n’abrite pas que cette espèce. Une colonie de Pipistrelles, nom scientifique Pipistrellus, est également présentes mais leur espèce ne peut être déterminée avec précision uniquement à vue.


Le repérage des 5 individus à l’aide d’un récepteur VHF et d’une antenne directive yagi de type HB9CV (un radioamateur suisse qui en fut le créateur pour les connaisseurs of course)


Le comptage des chauve-souris se fait à l’oeil : sous le pont on utilise un miroir pour renvoyer les rayons du soleil dans les cavités et on observe à la jumelle...


...l’habitat éclairé...


...ou bien au télescope. Un minimum de 325 (adultes et jeunes) Murins étaient dénombrées ce jour là, ainsi que 65 adultes et 19 jeunes visibles pour les Pipistrelles


Crotte de chauve-souris (guano) : comme celle d’une souris sauf qu’une fois écrasée elle se transforme en trainée de poussière, résultat des insectes ingurgités.C’est un excellent engrais naturel pour le potager !

Déjà des observations intéressantes

Malgré un échantillon étudié relativement faible, il semble que, hors colonie, le comportement de ces petites bêtes soit assez individualiste hormis lorsque le jeune devient volant. Dans ce cas, la rejeton suit sa mère dans ses déplacements ce qui permet un apprentissage de la chasse des insectes mais également une mémorisation du territoire.

Deux types de comportement ont été observés chez les individus équipés cette année : celles qui flânent un peu et vont inspecter les berges voisines en amont ou en aval du pont, et quelques énergumènes, comme celle que l’équipe a surnommé "Marie-Jo Pérec" qui part en éclaireuse et à grande vitesse inspecter les berges de l’Allier au delà du barrage, vers Monistrol. Si l’envol au crépuscule s’effectue en masse, avec d’abord un rituel de boire un petit coup dans l’Allier, le retour au gîte peut lui s’étaler toute la nuit voire en début de matinée pour celles qui retournent de plus loin.

L’étude se poursuivra sur 5 ans

Et nous risquons fort de revoir l’équipe l’an prochain, de nuit sous le pont d’Alleyras munie de ses lampes torches et frontales, ses antennes et récepteurs ultrasons, ses jumelles et télescopes infrarouges, qui sera là pour suivre l’évolution des effectifs et des habitudes de ces chiroptères vilains suceurs de sang… de moustiques.

Contact :

- Chauve-souris Auvergne
- 04-73-89-13-46