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250ème anniversaire des méfaits de la Bête du Gévaudan

D 17 septembre 2014     H 13:34     A mko     C 1 messages


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Ce n’était pas vraiment un loup, certainement un monstre hybride. Les interrogations sur la nature de la bête qui a sévi sur les plateaux de l’Aubrac, du Rouergue au nord Aveyron, de la Lozère à la Haute-loire de 1764 à 1767 blessant et tuant des dizaines de jeunes personnes isolées continuent d’alimenter le doute dans nombre d’ouvrages, de romans, de dessins, de sculptures, de recherches.

On en parle aussi encore volontiers même aujourd’hui. Les artistes s’y complaisent, citons ne serait-ce que le groupe Wazoo qui inaugurait le Festival Celte cet été à Monistrol d’Allier et qui entonna ce morceau La Légende du Gévaudan, en hommage sans doute au territoire qui l’accueillait.

Les récits effrayants de décapitations et la liste des jeunes victimes, une bonne centaine, pressaient les hommes d’église aux rapports et l’administration à demander renforts à Louis XV. Les chasses organisées par le régiment de dragons du Languedoc concluèrent à l’éradication d’un premier animal, similaire à un gros loup, puis un deuxième ressemblant à un canidé proche du loup fut tué par Jean Chastel de La Besseyre-Sainte-Mary. Les méfaits s’étant arrêtés après sa capture, cette dernière bête fut considérée comme la bonne qui sévit jusqu’à l’Aubrac. Mais un mystère subsiste néanmoins sur sa vraie nature. Était-elle une production de l’homme ?

Le loup vulgaire fut rapidement mis hors de cause. Certains auteurs ont alors évoqué un chien sauvage, ou d’attaque élevé par les propriétaires pour régler leurs différents entre voisins. Certains récits parlaient même d’un humain déguisé. Loups et lynx faisaient partie du paysage à cette époque, il faut le comprendre. Contrairement aux dires ils n’ont jamais été complètement éradiqués au début du XXème siècle. Le soit-disant retour actuel de ces animaux dans le secteur n’est sans doute qu’une vue de l’esprit qui facilite les demandes d’indemnisation de quelques éleveurs pour chaque attaque d’ovin, et désormais, nouveauté 2014, de bovin, suite à la démonstration de quelques éleveurs lozériens. Mais cette dernière fit chou blanc puisque les analyses ADN de cette attaque de Saint-Rémy-de-Montpeyroux sont formelles et le communiqué de la préfecture de l’Aveyron est clair : « L’expertise diligentée suite à un acte de prédation sur un jeune bovin survenu le 13 juin dernier en limite des départements de la Lozère et de l’Aveyron qui avait été attribué, dans un premier temps à un loup, a permis d’écarter formellement son implication dans cette attaque. » Mais nous glissons... dérapons ?

Adrien Poulchasac, conférencier passionné et grand spécialiste des canidés, émet une explication crédible. Ecoutons le :

« On a une identité de la bête dans la mesure où pour la bête du Gévaudan tuée par Jean Chastel on a un rapport d’autopsie fait par deux chirurgiens et un médecin qui la décrit en détails, c’est le rapport du notaire Marin, consultable facilement aujourd’hui. L’animal qui y est décrit, lorsqu’on transmet ce rapport à un vétérinaire, est un hybride entre chien et loup, qui tient plus du chien : gueule énorme, museau plutôt écrasé comme un chien, carrure normale 60 kilos. On va retrouver dans son estomac une tête de fémur de l’avant-dernière victime et elle correspond à la description du capitaine Duhamel qui avait fait un croquis deux ans plus tôt : de couleur roussâtre avec une tache blanche sur la poitrine en forme de coeur. Ces deux éléments plus les autres font qu’il est vraisemblable qu’il n’y est eu qu’une seule bête, puisqu’il n’y eut pas d’attaques simultanées. L’explication de l’acharnement sur les humains la plus plausible c’est que c’est un animal imprégné de l’homme, soit issu de la nature, une hybridation entre un chien de chasse au loup, qui va copuler avec une louve en chaleur en février – mars, et là elle va avoir des petits élevés par des loups (...). Ou alors c’est un animal qui a été produit par l’homme pour la chasse au loup, une hybridation volontaire comme ça se faisait dans l’univers de la chasse : on allait chercher un louveteau dans une tanière quand le grand mâle était parti, on le frottait au chiot de sa portée dans la cour de ferme et la chienne l’adoptait. Une fois que le loup était adulte il s’accouplait avec une chienne de la portée et on avait une hybridation avec un animal qui n’aboie pas et des performances à la course à la vue et à l’odorat pour chasser le loup. L’animal était dressé dans la plus grande violence, on l’envoyait chasser le loup et une fois sur trois il ne revenait pas. Que la bête fut dressée pour chasser le loup et qu’elle est échappée à son meneur, qu’elle ait recouvré sa liberté, et qu’une fois imprégnée des souffrances que les hommes lui avaient infligées en la dressant, en plus de son aspect horrible, elle ait eu un rapport de vengeance à l’homme, est très plausible. Il n’y a pas plus dangereux qu’un grand prédateur imprégné de l’homme car il intègre le schéma corporel de l’homme, ses outils et ses armes. Il est bien plus dangereux qu’un animal sauvage. »

Célébrations

Tout ce qui touche à un prédateur de l’homme fait recette et cela tombe à pic, c’est le 250ème anniversaire en ce moment des méfaits du loup-bête. Timide démarrage début 2014, mais selon nos sources quantité de manifestations vont éclore autour de cet anniversaire jusqu’en 2017.

En Lozère le premier Festival de la Bête organisé à Langogne en septembre 2012 ne sera pas réédité en 2013 ni cette année suite aux pressions, grossières, des éleveurs sur la municipalité nous confiait un des organisateurs. Le carnaval de Langogne cet été fut le point ultime de la détestation anti loup avec un char-message d’individus cagoulés et armés jetant des douilles vides sur le public, autour d’une cage renfermant un déguisé en loup. Le message semblait clair. A Mende par contre un projet important de maison des contes et légendes est sur les rails. La moitié de son espace serait occupé par ceux sur la Bête et son contemporain le jeune brigand justicier savoyard Mandrin qui serait passé dans la région et notamment à la Sauvetat près de Landos.

Le domaine des Barres, route de Mende à Langogne, une structure coopérative et résidence de standing montée par le département, accueille tableaux et sculptures sur la Bête provenant d’une collection privée depuis la mi août et jusqu’à la mi décembre 2014.

L’attrait pour les lieux de légendes comme le musée fantastique de la Bête du Gévaudan à Saugues qui en présente une histoire scénographiée, est confirmée : 13 000 visites par an sur les 3 mois d’été. Blandine Gires, animatrice, nous confiait que son association planchait sur un gros évènement en fin de période de commémoration, pour l’anniversaire de sa disparition. En Haute-Loire la tanière de la Bête du Gévaudan à Pradelles accueille les nombreux curieux les après-midi d’été.


La tête monumentale de la bête juste en face le musée dans la tour des anglais à Saugues

La bête est conjuguée à l’infini aussi dans les villages comme Alleyras, au centre des gorges de l’Allier, lieu avéré de passage des loups, et la soirée Promenons dans les bois en mai dernier où le Beau Léon pu raconter son histoire fantastique de la bête, très originale, et où Bernard Soulier pu dédicacer ses bouquins fut une réussite. Une des soirées organisées par Stéphan au Point multiservices du Relais gare.


Beau Léon pousse sa version. A droite Bernard Soulier

La bête n’a pas fini de faire parler d’elle, et en réfléchissant un peu on la retrouve 250 ans après, au milieu d’une actualité polémique mettant en scène différents acteurs dont certains des ancêtres purent avoir des pratiques... incontrôlées. On notera please notre retenue.


La jeune Marie-Jeanne Valet blesse la Bête en 1765. Sculpture de Philippe Kaeppelin à Auvers près du Mont Mouchet

A visiter :

- le musée de la bête à Auvers (Haute-Loire)
- la tanière de la bête à Pradelles
- la musée fantastique de la bête du Gévaudan à Saugues
- le parc des loups du Gévaudan à Saint-Léger-de-Peyre (Lozère)

A lire :

- « La Bête du Gévaudan dans tous ses états » de l’association Macbet qui vient de paraître,
- La Gazette de la Bête, passionnant magazine très ouvert qui en est à son numéro 13, édité par l’écrivain Bernard Soulier, cofondateur du premier forum sur le sujet,
- « Sur les traces de la Bête du Gévaudan et de ses victimes » de Bernard Soulier.

A consulter :

- le rapport du notaire Marin
- un site personnel bien documenté
- le musée fantastique de la bête à Saugues
- le parc des loups de Saint-Léger de Peyre

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